Bienvenue sur la tournée Rendus-là, celle d’un homme bien vrai, en tant qu’Artiste, en tant qu’humain… et plus encore … sur scène.
Car applaudir un concert de Bruno Pelletier, c’est aller un peu plus encore à sa rencontre, même un peu plus à la rencontre de soi-même, redécouvrir ses chansons avec des sonorités nouvelles, se laisser surprendre au travers de medleys tout à fait originaux, c’est se balader dans tout un tas d’univers musicaux différents mais toujours avec le même guide… Une tournée qui offre à chaque concert un souvenir unique et mémorable d’authenticité, de chansons tout aussi éclectiques que les instruments qui les jouent, d’une voix puissante et pleine de sensibilité qui se dévoile et s’envole au gré des mélodies tel un instrument à elle seule, de rires qui n’en finissent plus de ravir les zygomatiques, parfois même de larmes que l’on cède sous le coup de l’intensité de l’émotion reçue, de mots plein d’humour, de mots plein de vécus qui font écho en soi ; tout autant d’instants à vivre, à partager si fort que la scène et la salle se répondent et se mêlent avec délice.
Mais tout d’abord, petit tour de la mise en scène, épurée pour laisser sa place à l’essentiel. Un décor à l’image même de l’artiste, éclectique, sobre et lumineux à la fois… A chaque titre, le rideau de fond de scène dépeint en projection de lumières les auteurs et compositeurs, belle façon de leur faire la part belle pour ne pas oublier ceux qui ont posé les bases de chaque chanson. Des noms connus ou reconnus apparaissent, de ces autres qui ont posé leur talent de musicien, d’écrivain ; des noms comme celui de Bruno lui-même qui revient tantôt de ses notes, tantôt de ses mots, tantôt des deux, accompagné, ou seul. Devant ce rideau aux teintes bleutées, à l’image de la pochette du dernier album de l’artiste, s’étale une foule d’instruments aussi divers que variés… non pas une, mais deux batteries … idem pour les claviers … et ces guitares qui se déclinent de toutes les façons possibles : sèche, électrique, basse …, au milieu de tout ceci, on distingue même un accordéon et un inattendu bâton de pluie. Un décor bel et bien à l’image de l’artiste... lumineux comme les noms qui défilent en fond, comme les lampes hautes simplement posées au sol et débarrassées de leur abat-jour pour ne laisser que les ampoules brillantes, telles des bougies éternelles, dont la flamme ne vacille jamais… Un décor sobre car sans superflu … Un décor éclectique comme les notes que l’on croit déjà entendre s’échapper de la multitude d’instruments qui n’attend plus que des mains passionnées pour s’exprimer.
Les lumières se tamisent enfin… dans la salle, l’ambiance est déjà joyeusement fébrile. La belle équipe entre en scène, fidèles et amis de Bruno depuis quelques années déjà : Marc Bonneau à la batterie, Jacques Roy à la basse, Louis Côté à la guitare électrique, Julie Lamontagne au clavier et Bruno, non en reste, … au clavier lui aussi. Le ton est donné et l’on comprend pourquoi les instruments se sont dédoublés, l’artiste a décidé sur cette tournée de présenter son côté musicien, moins connu que son talent d’interprète. Et c’est même seul au clavier qu’il entame le premier single de son nouvel album « Je m’écris ». Les premières paroles se parent d’une douceur telle qu’on se laisserait presque bercer avant d’être littéralement embarqué par l’effusion de la batterie qui s’en vient donner le rythme, des guitares et des claviers qui vibrent de toutes leurs cordes. Toute première chanson et déjà le feu qui rayonne de toute la scène… On sent la salle toute prête à lâcher sa retenue, qui n’ose pas encore mais il suffit d’une invitation de l’artiste à faire du bruit pour que la salle s’émancipe car comme le dit si bien Bruno « un bon show, ça se fait avec vous autres ». Et voilà une première salve d’applaudissements, qui ne cesseront de gagner en intensité tout au long du concert, on applaudira même en pleine chanson, on donnera de la voix, pour rendre la pareille de ce qu’on aura reçu. S’en suit «Où que tu sois » et déjà on se dit que lui aussi « où qu’il soit, on le suivrait partout, jusqu’à la fin du monde » tellement on passe déjà un moment magique. Ca donne tellement de tout, du rythme, de la voix, des notes, de l’âme, du cœur, beaucoup de cœur.
Troisième titre et première surprise … Si Bruno est rendu-là après quelques années déjà, c’est que dans sa carrière, il y a eu des « éléments déclencheurs », chansons réservées bien souvent pour le rappel mais qui n’attendront pas ce soir … et voilà qu’on se retrouve plaqué au fond de son siège, la mâchoire menaçant de se décrocher devant une telle performance… Bruno nous offre un épatant « Miserere », attaquant même le morceau à pleine puissance avec une aisance déconcertante, c’est comme si un grand souffle était venu balayer la salle, quel effet !
Tournée « Rendus-là », comme le titre de son dernier album, et celui de la chanson qui s’annonce particulièrement intense... Bruno explique avec ses mots bien à lui la genèse de son album, ces « missives », « chansons-lettres » adressées à des proches. « Rendus-là » est adressé à sa femme, il explique la réflexion qui a mené ce titre à voir le jour : ce que veulent dire les mots « pour toujours » quand on s’engage avec quelqu’un pour longtemps. Petite précision de l’artiste pour le longtemps : « 5 mois et plus » ou alors quand ça fait longtemps qu’on est avec quelqu’un, « que c’est pas facile, surtout quand t’es avec moi » qu’il nous dit, haha et voilà qu’on rit autant que lui-même de ces appréciables notes d’humour. Evidemment avant de prendre place sur l’album et sur la tournée, Bruno a fait écouter la chanson à sa femme, c’est que la chanson, il fallait bien qu’elle « passe au conseil » tiens ! Nouveaux rires et l’on se réjouit de ce joli mélange de vérité et d’humour qui font que l’on découvre chaque soir un peu plus l’homme. Comme toujours les paroles invitent à l’introspection, la musique quant à elle soutient les mots avec une force rare, et cette voix … qui lâche sans retenue… un véritable cri du cœur. Chanson intense oui … qui aura bien évidemment beaucoup plu à Madame et qui, nous confie l’artiste … s’attendait plus à une balade … ce qui ne manque pas de nous faire sourire une nouvelle fois… car on imagine aisément la surprise ressentie ! Et voilà qu’arrive le traditionnel cliché « comme quoi les filles, ça veut toujours des balades » … hum… on aurait presque envie de lui répondre : monsieur l’artiste, à en juger la gente féminine certes accompagnée de leurs hommes dans la salle et l’éclectisme de votre répertoire, il n’est peut-être pas certain que ça soit toujours le cas… haha. Ca du répondant, le public n’en manque jamais. Bruno nous a invités dès le début à « une partie de ping-pong » et l’échange est soutenu tout du long, si bien qu’on arrive même plus à compter les points ! Pas cabotin pour deux sous, l’artiste vient nous taquiner régulièrement et l’on répond avec joie, comment ça on ne va pas tenir la route à envoyer les applaudissements avec autant de force tout le temps … ? Si si, non mais … la preuve !
Séquence émotion… avec « Coriace » … chanson « fétiche » de Bruno, écrite à son père, décédé depuis d’une longue maladie. Chanson que l’artiste joue à chaque spectacle, cette chanson « clé » qui semble le connecter avec celui qui veille désormais sur lui… Et quel bel hommage, dans sa forme la plus pure, comme la chanson a été composée : juste une guitare, l’émotion du cœur, la voix silencieuse de l’âme qui se délivre de toutes ses forces d’un corps malmené, la voix puissante et touchante de l’artiste qui vient résolument nous chercher au gré des mots qui expriment tous les maux… Probablement un des textes les plus forts et les plus intimes que Bruno a pu écrire de lui-même. Tout comme le titre qu’il enchaîne avec toute sa belle équipe : « Le bon gars et le salaud », ou l’on se croirait pris au cœur des pensées même de l’artiste…
Place ensuite au chapeau qui s’est invité sur scène, que l’on aura remarqué, posé paisiblement sur un tabouret, tel un membre à part entière de l’équipe. Ce chapeau qui l’air de rien recèle bien des surprises. L’été dernier Bruno a eu l’idée de demander sur Internet quelles chansons le public aimerait bien entendre sur la nouvelle tournée, en plus de celles de son nouvel album évidemment … et pas moins de 100 propositions sont revenues régulièrement ! Faut dire que ça en fait des chansons … 11 albums, 7 comédies musicales et comme l’artiste le dit « un nombre incalculable d’évènements tous ramassés sur Youtube ». Au final, Bruno et son équipe auront retenu une quarantaine de titres, qu’ils ont monté, réorchestrés parfois au gré des sonorités nouvelles pour les faire redécouvrir, beaucoup de boulot pour de belles surprises et quelles surprises… Ainsi, l’artiste demande à quelqu’un du public de « piger » une chanson (avec le droit de garder le papier en souvenir « parce qu’ils ont du budget papier cette année » haha), deux ou trois fois pendant le spectacle. Ca amène un petit côté imprévu bien sympathique, autant pour la belle gang de spectacle que pour le public. Ainsi, on se retrouve autant emporté par un groovant « You gotta move » de Gino Vannelli que les plus courageux spectateurs accompagnent même en dansant, subjugué par le son magnifiquement brut de « Roxanne » que Bruno interprète carrément en duo avec la seule guitare électrique de Louis ou encore étonné de la douceur jazzy de « J’oublie ma folie » qui vient formidablement s’associer aux mots plutôt imposants de la chanson. Quelle belle idée ce chapeau … on aurait envie de les entendre toutes les surprises qu’il cache… ! Mais la raison l’emporte, Bruno prétextant même qu’on n’est pas capable de rester assis jusqu’à 4h du matin (suffirait de se lever quand ça « brasse » tiens, haha) pour toutes les entendre … personne n’a encore osé lui dire« chiche » … Car il faut bien l’avouer malgré tout, un concert comme celui-ci, c’est joliment émotionnellement éprouvant tellement on en prend les yeux, plein les oreilles, plein le cœur. Plein les yeux alors que la mise en scène est sobre … et bien si pourtant … Il suffit de regarder Bruno, les paroles et les émotions défilent littéralement sur son visage … Il suffit de regarder les musiciens aussi, Marc déchaîné tel un « lion » fougueux sur sa batterie, Jacques au regard plein de force et de gravité qui fait écho aux sons de sa basse, Louis aux allures de rockeur avec ses lunettes noires qui semble résonner de lui-même des envolées de sa guitare électrique, sans oublier Julie qui s’impose avec évidence aussi bien avec la tendresse des notes du piano que la puissance musicale du clavier ; et sans oublier Bruno lui-même aussi … Bruno qui s’épanouie totalement, tout autant que son « band de course » bien sûr, à naviguer de guitare sèche en clavier, de batterie en guitare électrique, et nous emmène de rives en rives au gré de son talent indéniable de musicien. Tous affichent un même plaisir, celui d’être là, sur scène et de partager autant ensemble qu’avec le public.
Retour au dernier album … le plus intime que l’artiste qui lui-même le confie, n’ait jamais fait. Un album plein de vécu qui parle forcément à chacun et à tous à la fois. La prochaine chanson est dédiée à son fils… pas évident de présenter « une chanson à son fils de 22 ans, doublé d’un rockeur qui écoute du métal, avec les cheveux longs jusque là, on se demande bien à qui le fils fait penser ouais …» mais pari réussi et avec brio. C’est une belle leçon de vie de Bruno nous offre là … La pièce s’intitule «J’ai posé des pierres » et est une belle métaphore de la vie de parent. Bruno nous raconte que lorsqu’il a quitté le nid familial pour voler de ses propres ailes, son père lui a donné un coffre d’outils, avec de ses outils à lui, de ceux de son grand-père, tel les outils de la vie, de ceux qui sont passés par là avant lui et lui ouvrent le chemin. Alors quand son fils est parti à son tour, Bruno a fait de même, passant à son tour le relais à son fils. Ainsi est né « J’ai posé des pierres » au texte fort qui illustre parfaitement le chemin bâti d’un père qui a posé les fondations pour que son fils y construise sa maison, sa vie à son tour, tel un guide présent et distant à la fois, celui qui dessine la voie tout en laissant l’autre aller à la rencontre de sa propre vie…
La fin de la première partie s’annonce … mais pas déjà … on a pas vu le temps passé certes mais il ne passe pas trop vite non plus… A ce concert là, le temps suspend son vol dans sa cadence infernale, une pause bienfaisante dans le quotidien qui a disparu aussi loin que l’horizon. On vit tout simplement l’instant présent. Au tour de faire honneur aux musiciens, souvent présentés à la fin mais Bruno a eu la bonne idée de nous les présenter bien avant « pour savoir avec qui on passe la soirée », ce qui renforce assurément ce grand sentiment de partage… Il les taquine aussi gentiment on nous disant « que présentés vers la fin du show, ils partent dans des envolées solos et qu’ils se passent bien de lui ». Alors ils ont monté un numéro étonnant et détonnant en alliant des chansons qui « ont marqué leur vie et qui font qu’aujourd’hui ils font ce métier là » … (les liens sonores des chansons originelles figurent en commentaires de l'article, ici à écouter en imaginant la voix de Bruno et une orchestration moderne) Et nous voilà trimbalés d’un univers musical et personnel à l’autre, d’un musicien mis en avant à l’autre pendant une bonne dizaine de minutes ... et quel voyage, limite intergalactique ! Du maître du jazz Chic Corea qui se mêle au « Without love » (Long train running) des Boobie Brothers, avant de passer à du Gilles Rivard avec « La tête en fête », puis « Higher Ground » de Stevie Wonder avant d’être transporté à du Fiori-Séguin avec «Viens danser », le tout agrémenté d’un son plus rock qui sied bien à chaque titre… Mention toute spéciale pour« Viens danser », Bruno s’installe à la batterie et la partie finit carrément en battle de drums entre Marc et Bruno, quel show ! C’est sur ce medley épatant qu’on marque une petite pause. Un medley qui correspond bien à cette belle équipée de musiciens, chanteur-multi-instrumentiste compris, une équipée elle aussi éclectique, et complémentaire à la fois.
Fin de l’entracte, lui par contre, il est passé très vite… Avant de partir, Bruno nous a demandé si on passait une bonne soirée … parce « qu’il fallait qu’on revienne après la pause » ! Haha, comme quelqu’un a bien répondu un soir « toi aussi, faut que tu reviennes » … Et nous revoilà, tous bien réunis pour la seconde partie qui démarre littéralement sur des chapeaux de roue ! Ca attaque directement par « Autant que toi », que Marc a composé et que Bruno accompagne lui aussi à la batterie, il n’y a plus un lion sur scène mais deux et surtout … personne pour les dompter … ! Autant dire que ça y va des baguettes, qui battent et s’abattent encore et encore sur toutes les caisses et que Bruno finit même par envoyer faire un tour dans les airs… ! Bruno s’en va peut-être sur ses 51 ans mais à le voir s’éclater sur le drum comme ça, on ne peut qu’inverser les chiffres. Pas le temps de reprendre son souffle que ça embraye sur « Le pape des fous », extrait d’un show "qui a vaguement marché dans le passé " … haha … vaguement … comme une déferlante alors… ! Chanson qui aura fait remonter le temps à toute la salle, pour peu on chercherait Quasimodo du regard et on finit par rhabiller Bruno de son costume de Gringoire dont les mimiques ont gardé toute leur fraîcheur.
Petit clin d’œil à Notre-Dame de Paris et le moment est venu d’évoquer un grand Monsieur : Luc Plamondon . Un grand Monsieur que Bruno a côtoyé tout au long de sa carrière, de la Légende de Jimmy à Starmania, de Notre-Dame de Paris à la belle collaboration qui a donné vie à une bien belle chanson « Aime ». Tout autant de « belles aventures » que Bruno a eu avec Luc… là Bruno bute et percute sur sa phrase et finit par lâcher d’un ton rieur auquel on se joint volontiers « aventures dans le bon terme évidemment ». En même temps … avec une chanson qui s’appelle « Aime », la formulation quelque peu dérapée était toute appropriée, haha. Mais ce que l’on retiendra surtout de cette belle pièce, ce sont ces mots sublimes « Aime, c’est la seule vraie raison de vivre, le plus dur des chemins à suivre, ça ne s’apprend pas dans les livres, aime, c’est la loi de la bible, le rêve encore possible, d’un univers, où tous les hommes seraient des frères … »
Dernier album et chanson originale … Bruno nous explique avec justesse « qu’on est comme programmé à avoir un jour une peine d’amour », thème qu’on retrouve partout, dans les livres, dans les films et plus encore les chansons mais s’il y a bien une chose à laquelle on n’est pas préparé, c’est la peine d’amitié et ça, peu de chansons ont été écrites à ce sujet. Alors, au détour d’une discussion avec son ami Yves Soutière, est venue l’idée d’écrire sur cette «cassure» qu’on peut avoir un jour quand on se brouille définitivement avec un ami, sentiment d’abandon qui peut être tout aussi fort qu’une peine d’amour. Yves a posé les mots sur cette épreuve, Bruno en a posé les notes et c’est au clavier qui résonne d’un son grave qu’il s’accompagne. Là encore les paroles de « On oublie » marquent les esprits « Seul au bout du fil, ta voix qui se défile, comme toi la terre est si loin, elle se retire, pour ne plus jamais revenir, seul, tu juges et condamnes, seul, je te rends les armes, je savais pleurer un amour, pas un ami, qui ne veut plus jamais revenir, on oublie les mots que l’on sème, on oublie les rêves et les rires, on oublie les gens que l’on aime … »
Bruno, sans transition, annonce qu’il est « un fan fini de Peter Gabriel » et à l’écoute des réactions de la salle, il n’est pas le seul … Bruno est toujours au clavier, c’est qu’il n’hésite pas à en jouer même si fait juste 3 ans qu’il en fait, au risque de ripper une petite fois comme à la toute fin de la chanson précédente… Personne n’aura bien évidemment rien entendu de l’accord modifié au passage, et personne n’en aurait rien su si ses musiciens n’avaient pas fini tout simplement morts de rire… ! Bruno était bien obligé de nous expliquer pourquoi, histoire qu’on rigole aussi devant cette gang parfaitement complice. Ca, à force de taquiner les autres, on se fait renvoyer l’ascenseur à un moment donné, pour le plus grand plaisir de tous. Toute première fois que Bruno joue un cover de l’artiste qu’il admire sur une tournée et il a choisi « Don’t give up ». Bruno prend alors la place de Peter Gabriel tandis que Julie remplace Kate Bush et nous épate littéralement de son magnifique grain de voix, cristallin et solide à la fois … Ca, c’est aussi une bien belle surprise ! La musique et les voix s’enlacent à merveille, on se laisse totalement bercer par l’harmonie jusqu’à se retrouver dans une bulle de plénitude qu’on ne voudrait plus quitter… c’est beau, tout simplement.
Chanson du nouvel album avec « Ton amour meurt », ou pas … car le bloc de chansons de base qui fait le concert change un peu tous les soirs. Chaque concert est unique, pour tous plein de raisons déjà évoquées, et aussi pour ces petits cadeaux choisis par Bruno qui font que chaque soir a une saveur différente. Les chansons se baladent de la trame cimentée du spectacle, au chapeau ou ailleurs. Ainsi un soir on a pu apprécier une très belle pièce, rarement entendue jusque là … avec « Ma vie »… Chanson qui figure sur l’album Miserere de Bruno, petite merveille qui rend hommage à l’amour au sens le plus noble, cet amour inconditionnel qu’on finit par avouer tant il est devenu essentiel quand on a enfin trouvé son autre, sa moitié, sa « vie » … Grand moment d’émotion, on aurait dit que Bruno avait le micro à même le cœur et que Julie parvenait à faire couler des larmes de bonheur des pleurs mélodieux du piano.
Parenthèse avec une nouvelle chanson chapeau (pigée par un monsieur, « pas toujours les filles quand-même » haha) avant d’explorer un univers qu’on avait mais alors, encore jamais entendu avec Bruno … ! L’artiste nous explique qu’à chaque concert, il parle de sa mère … Mais qu’il prend d’habitude des anecdotes de vie, qu’il les grossit quitte à en rajouter un peu, voir beaucoup … Mealculpa, cette année, Bruno a décidé d’arrêter les « niaiseries » (merci maman Pelletier d’avoir fait la morale à votre fils haha), de ne dire que la vérité, rien que la vérité et de rendre une nouvelle fois hommage à sa mère. Les parents de Bruno aimaient beaucoup le folk-country, notamment Elvis. Le père comme tous les samedis soirs préparant son steak et ses oignons français avec un verre de vin, écoutait du Johnny Cash ; tandis que la mère, inconditionnelle de l’artiste en question écoutait du Joe Dassin … mais tout ça… en même temps ! (« à l’époque où y avait pas d’Ipod ») Alors Bruno a eu l’idée de monter un medley assurément country en y greffant de ses chansons à lui qui pouvaient « se countryser »… Il ne manque que « the accessoire » pour que le tableau soit parfait … Arrive alors sur scène un autre chapeau (« ils ont eu du budget chapeau aussi cette année » alors…), the chapeau de cow-boy qui se marie bien avec la chemise à carreaux de Bruno, manque vraiment plus que les tiags pour la danse en ligne… Attention à bien exprimer qu’on le trouve « wow » à le voir avec ce beau chapeau sur la tête sinon gare à la mignonne pique « normalement ça crie, ça capote…». Evidemment on répond en donnant de la voix autant qu’on peut (faut bien que Bruno ne soit pas le seul à user de ses cordes vocales) pour rattraper le coup mais non, ça ne suffit pas et on se prend un « ouais ouais, je sais, vous êtes fatigués là … » haha, on est bien tombé dans le piège mais on a pas dit notre dernier mot non plus. Nous voilà alors projetés dans l’enfance de Bruno et de sa sœur, au cœur du salon familial. Après son repas, le père de Bruno prenait la guitare et jouait « un gros répertoire de quatre tounes », toujours les mêmes mais de quoi laisser de « fabuleux souvenirs » à sa famille… nous dit l’artiste : « ça commençait toujours, mais alors toujours ! de cette façon là » … ou presque … ! Haha, ce qu’ils sont farceurs ces doigts, cette fois à la guitare, qui s’amusent à changer d’accord comme ça, sans prévenir … et les musiciens qui se marrent tellement qu’on les entend bien fort dans la salle, et nous voilà pris à notre tour d’un irrépressible fou rire (ça, c’est pour la pique d’avant, haha). Là on peut compter les points, et un par tout ! Allez on se reprend et c’est parti pour un medley hors du commun… Va d’abord pour « Folsom Prison Blue» de Johnny Cash, puis des chansons de Bruno avec « Depuis que t’es parti » et « Ailleurs c’est comme ici » qui aussi étonnamment que ça puisse paraître résonnent vraiment bien de leur nouvelle acoustique country. S’en suit un typique « Sundown » de Gordon Lightfoot et alors, on se dit même que ça lui va bien à Bruno le country … en même temps, quel style ne lui va pas ? lui qui a fait « toutes sortes d’affaires dans sa vie, du rock, du jazz,du classique » et tant d’autres encore. Retour sur les chansons de Bruno avec « En manque de toi » puis « Que tu m’aimes », elles aussi tout joliment parées de couleurs country. Et l’on finit par le fameux Joe Dassin avec « Salut les amoureux ». Un hommage de Bruno aussi surprenant qu’évadant à sa maman.
La fin du concert approche mais il reste un instrument dont Bruno n'a pas encore joué … lui qui comme il le dit avec humour « joue de plein d’instruments, mal, (façon de parler parce que si lui joue mal, nous autres alors qu’est ce que ça serait … haha), mais qu’il joue, quand-même, de plein d’instruments » et nous en fait une belle démonstration. Le dernier à passer entre ses mains est la basse … En montant son spectacle, Bruno s’est demandé ce qu’il pourrait bien jouer à la basse… Il s’est rappelé que dans les années 80, avec son groupe de rock, il avait pris le relais à la basse quand son bassiste était passé au clavier pour jouer entre autres du Deep Purple et du Led Zeppelin… Bruno a donc concocté un numéro en partant d’une de ses chansons avec des petits clins d’œil à ces deux groupes résolument rock. Quelques secondes pour chauffer un peu plus la salle, déjà au bord de l’implosion ou de l’explosion, c’est selon, qui y va de ses cris, c’est comme le dit l’artiste « que ça prend de l’attitude quand on fait du rock »… et voilà la salle carrément transformée en un stade en folie devant un groupe de rockeurs tout aussi fou ! Sur un « Perfect strangers » de Deep Purple, la guitare électrique s’envole dans des solos exaltants sur le son lourd et imposant des basses qui font vibrer leurs cordes au point de les ressentir en plein corps. La voix de Bruno en impose elle aussi, on dirait une guitare à elle seule tellement elle en envoie. On a peine le temps de remarquer le changement de chanson que résonne déjà la belle pièce de Bruno « S’en aller », revisitée avec des touches à la Led Zeppelin comme sur l’album « Sur scène » … déjà qu’en écoutant l’album, on a envie de remonter le son, là on reçoit juste la chanson à pleine puissance et de pleine face … wow … c’est un vrai moment d’anthologie qui vient de s’écrire sous nos yeux et nos oreilles ! Un beau moment qui clôture le spectacle dans une ambiance de feu.
Evidemment, on ne veut pas en rester là, on ne peut pas en rester là, alors on bat des mains à tout rompre, la preuve qu’on a encore de l’énergie à revendre, surtout avec l’effet galvanisant du dernier tableau, on en veut encore, et encore … et on va être servi ! Parce Bruno ne "revient qu’une fois mais il fait plein de chansons" …! Le rappel prend carrément des allures de troisième partie… Bruno prend d’abord le temps de remercier le public avec un « j’apprécie beaucoup que vous vous soyez déplacés, parce la scène c’est l’endroit où on peut vraiment découvrir les artistes, on les écoute sur disque, on les écoute à la radio mais c’est la scène qui fait vraiment qu’on est vraiment vivant, avec nos musiciens, avec nos techniciens, avec notre monde, c’est ça notre vrai métier, c’est d’être ici, avec vous alors je vous remercie, on le prend pas pour acquis, c’est important de vous le dire, que vous sachiez que peu importe où on joue, quand il y a du monde qui se déplace, ça nous fait quelque chose alors merci, beaucoup ». La vérité d’un artiste se dévoile plus que jamais sur scène et tout le concert en aura apporté la preuve. Bruno en profite pour saluer ses techniciens, hommes de l’ombre qui font un travail fabuleux du matin au soir pour « rendre meilleur, plus beaux » ceux dans la lumière… On applaudit et on remercie donc Hugo au son, Nico à l’éclairage, Francis aux instruments de musique et Maurice à la direction de tournée.
Nouvelle chanson, nouvel album, nouvel engagement et quel engagement… Bruno nous raconte qu’il est devenu depuis septembre le porte-parole de la Fondation québécoise du cancer. Une fondation qui œuvre non pas pour la recherche mais pour l’humain, celui qui se bat contre la maladie en offrant des soins tels la massothérapie, l’arthérapie, mais aussi ceux « qui font la petite armée autour du patient » et qui soutiennent leur proche. Car quand le cancer s’invite sans jamais y être invité dans la vie de quelqu’un, il ne touche pas que la personne qui en souffre mais tous les proches qui vivent eux aussi au rythme de la maladie. La Fondation intervient donc pour accompagner tout ce monde à surmonter cette épreuve en adoucissant autant que possible le quotidien. Bruno tient son rôle de porte-parole avec la réalité jamais surfaite du vécu car il a lui-même fait partie de cette petite armée autour d’un proche, sa sœur, qui a vaincu le cancer par deux fois. C’est ainsi que la chanson « Un si long chemin » est devenue une « chanson thème » pour la Fondation tant elle illustre le combat des uns et des autres face à la maladie. Bruno s’accompagne à la guitare électrique pour cette pièce qu’il a voulu plein de force, à l’image de sa sœur. Un texte lui aussi paré d’une force incroyable, cette force d’âme inoxydable telle « Malgré la terre qui gronde, les peurs auxquelles tu songes, y a cette foi qui t’étreint et la force qui convainc que tout est possible et ce, malgré les malgré », d’un espoir que rien ne peut éroder, un véritable hymne combatif pour tous ceux qui ont et auront un jour à passer au travers d’un moment douloureux.
On aura remarqué qu’il manque quelques éléments marquants de la carrière de Bruno … qui ne tardent pas à arriver… Il entonne l’intemporelle « La Manic », le silence se fait dans la salle. On écoute avec une attention absolue et respect ce grand titre de la chanson québécoise reprise par une grande voix…avant d’être invités à faire les chœurs. Et voilà la salle devenue chorale sous la direction d’un appréciable chef d’orchestre…
Dernière chanson chapeau … pigée mentalement par Bruno lui-même… selon l’ambiance de la salle, ses envies, ou encore les petits cadeaux qu’il veut faire… Ainsi on s’émerveille, encore une fois, devant un sublime « SOS d’un terrien en détresse » et cette voix incroyable qui couvre à elle seule toute la gamme musicale, des graves aux plus aigus en y mettant l’émotion des paroles qui vient vous cherchez au cœur de l’âme.
Et voilà qu’il est venu le temps de la fin … qu’il est venu « Le temps des Cathédrales »… Julie a revêtu l’accordéon et donne une touche toute originale à cette incontournable pièce de Notre-Dame de Paris. La salle reprend s’en attendre le refrain et Bruno nous tend même le micro… Ainsi s’achève le spectacle, dans un grand moment d’unicité si cher à l’artiste…
Un concert absolument évadant, impressionnant, émouvant, parfaitement « écœurant »... tout autant de mots forts qui illustrent autant ce concert que Bruno lui-même et sa belle gang de musiciens… Quelle belle palette d'émotions et d’univers nous avons traversés là... quel voyage gravé à jamais dans nos mémoires et nos cœurs…Deux mots nous viennent immédiatement à l’esprit : bravo et merci tels qu’on les entend dans la salle, oui, un grand bravo et un grand merci, pour tout. Pour tout et surtout pour cette véracité … Car cette véracité, elle "s’émane" de Bruno dans chaque note, chaque mot. Elle défile sur son visage au gré des paroles, se lit dans le profond de ses yeux. Elle s’entend dans sa voix, quelle que soit la chanson, quelle que soit l’anecdote, quelle que soit le propos plein d’humour et de vérité qu’il nous livre. Elle s’écoute sur chaque instrument qu’il fait s’exprimer tantôt avec force, tantôt avec douceur. Bruno, toujours fort de cette véracité qui ne lui fait jamais défaut, fait partie de ces artistes qui nous emmènent toujours à la rencontre d’univers éclectiques et on le suit sans retenue, car on sait que le guide qui nous invite, va chercher autant de nous autres, qu’il livre beaucoup de lui-même…
Célia Voisin
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